Ma Ludi,
tu n'es plus là.
J’ai envie de te t'écrire toutes les belles choses que tu as apportées à ma vie.
Je t’ai rencontrée quand j’avais 13 ans, Laurent a bien choisi, et la première chose que tu m’as offerte, c’est ton écoute attentive. Attentionnée comme tu es, tu as écouté mes « petites histoires quotidiennes » de collégienne avec beaucoup d'intérêt. Dans notre famille nombreuse, je n’avais pas été habituée à tant d’attention, et cela m’a beaucoup touchée. J’allais bien l’aimer cette nouvelle belle-sœur!
Ensuite, tu m’as offert ton accueil chaleureux, chaque fois que je suis venue vous voir : à Paris d’abord, puis, comme vous aimiez beaucoup bouger avec Laurent, il fallait partir loin pour vous suivre : à Stockholm, Dubaï, Munich, Londres, j’en oublie sans doute. Dans chaque ville, tu m’as emmenée me promener, tu m’as montré les endroits d’intérêt, tu t’es posée à une terrasse pour discuter, tu m’as amenée à vélo, à pied, en barque de fortune. J'ai découvert grâce à toi la meilleure forme de tourisme : celle où l’on rend visite à des personnes que l’on connaît et que l’on aime. Ton bon accueil s’est poursuivi à Lyon où nous avons partagé de nombreux mercredis avec les enfants.
Tu m'as fait découvrir des choses extra-ordinaires.
Premier hammam à Paris.
Premier fika (pause café) à Stockholm. Sérieux, quand est-ce qu’on importe le concept ?
Tant qu’on est à Stockholm : premier plat de rennes.
Première après-midi piscine au milieu du désert.
Première promenade à dos de chameau.
Tu as amené de la superficialité à ma vie : celle qui nous rend heureux. Les ventes privées best-seller, pour être stylée, les salons de manucure, pour être belle jusqu’au bout des ongles, les produits de beauté incroyables pour avoir la peau douce (qu’est-ce que j’ai pu me réjouir de vous piquer shampoing Laroche posay et autre gommage aux fleurs de je ne sais pas quoi lors de mes visites à Paris!). Merci de m'avoir laissée te copier parfois.
Tu m’as appris à poser le regard sur la beauté : premier spectacle de danse à Saint Rambert (qu’est-ce que tu étais belle !), un autre dans une église à Paris, et clou du spectacle ce magnifique gala que vous aviez organisé à Dubaï avec Reiko : un ballet avec les danseurs de l'opéra de Paris. Lors de ces soirs de représentation incroyables, il y avait même Monsieur l’ambassadeur ! Je t’avais trouvée magnifique en organisatrice.
Tu m’as montré la douceur aussi. Je t’ai toujours trouvée douce. Je garderai ta douceur quand je coifferai mes filles, je garderai ta douceur quand je jouerai à des jeux comme tu l’as fait le mercredi avec les enfants, je garderai ta douceur quand je me ferai un thé. Tu m’as offert tes bras, tu m’as consolée. Tu as été là.
La veille de ton décès, une amie m'a écrit « Je pense - ou je veux penser - que dans tout moment sombre de la vie, il y a toujours une petite étincelle de beauté, de poésie, ou d'humanité, qui jaillit » . Elle a raison. De tes dernières semaines à l'hôpital, je retiendrai ta grâce, à la façon que tu avais d'étendre tes jambes dans ton lit ; ton esprit espiègle, dans les traits d'humour tu arrivais encore parfois à faire ; ton regard sur mes nouvelles boucles d'oreilles (je les avais mises pour te faire plaisir) ; ton compliment sur ma robe (je l'avais mises parce que je savais qu'elle te plaisait) ; ce merveilleux cadeau que notre dernière après-midi ensemble, à l'ombre douce d'un arbre sur l'esplanade du Val Rosay, calme et sereine ; et la dernière fois que j'ai vu ton reflet dans le miroir de l’ascenseur : un fauteuil roulant, d'accord, une potence, certes, mais la classe, du style jusqu'au dernier souffle.
Ma belle-sœur. Comme tu as bien porté ton nom toutes ces années ensemble. Et même, mon amie. Merci pour tous ces moments partagés, toutes ces joies, toute cette bonté. J’ai eu de la chance de te connaître. Merci d’avoir été sur ma route.
Tu vas terriblement me manquer. Et en même temps, je sais que tu seras tout près, dans la grâce et la douceur du quotidien.
Love you always,
Camille